« Renoncer au régime n'est pas renoncer à maigrir» . Dr Jean-Philippe Zermati, médecin nutritionniste.
Etat des lieux sur les régimes amaigrissants
Aujourd'hui, la normalisation du corps est devenue un réel fait social collectivement développé. La dictature de l'image du corps soumet de nombreuses personnes, non seulement celles en situation de surpoids ou d'obésité, à débuter un régime amaigrissant, et ce dès le plus jeune âge.
De telles modifications sur le corps génèrent souvent des perturbations somatiques avec des troubles d'ordre osseux, musculaires, ou circulatoires. De plus en plus, des perturbations psychologiques telles que des troubles du comportement alimentaire se développent par le biais de ces régimes. La stabilisation du poids devient alors un schéma impossible, car en enchainant les régimes amaigrissants, les personnes s'inscrivent dans un cercle vicieux, le célèbre "effet yoyo".
En 2009, l'agence française de sécurité sanitaire des aliments a été sollicitée pour réaliser une évaluation des risques liés aux pratiques alimentaires d'amaigrissement. Ainsi, 15 types de régimes ont été analysés. Parmi eux, on retrouve le fameux régime du Dr. Dukan, la chrononutrition, le "citron détox", ou encore Weight Watchers.
Le rapport d'expertise révèle les nombreuses failles de ces régimes par rapport aux ANC (Apports Nutritionnels Conseillés) :
- Pour plus de 80 % des phases de régimes les apports en protéines sont deux à trois fois supérieurs à l'ANC.
- Les apports en lipides (graisses) sont supérieurs à l'ANC.
- La quasi-totalité des régimes ou phases de régimes étudiés propose des apports en glucides inférieurs à l'ANC.
- Les apports en fibres sont près de dix fois moindres par rapport à l'ANC.
L'équilibre alimentaire est alors complètement perturbé.
La promesse de perte de poids est donc biaisée par un déséquilibre total de l'alimentation. L'amaigrissement se fait alors aux dépens des réserves de masse grasse, car la perte de masse musculaire conduit rapidement à l'affaiblissement des sujets.
La reprise pondérale concerne près de 80 % des personnes après une année, et celle-ci augmente avec le temps. "L'effet yoyo" est bien réel, ce n'est pas un manque de volonté.
Lorsque vous perdez du poids, la leptine (hormone de satiété) envoie un signal de « déficit énergétique », ce qui ne fait qu'augmenter la sensation de faim. Ce phénomène se crée en association avec d'autres de nombreux signaux nutritionnels, neuronaux et endocriniens.
L'alimentation intuitive, l'antidote des régimes ?
Lorsque vous faites des régimes amaigrissants, la reconnaissance de l'état interne de votre corps est délaissée. Vous êtes alors en état de restriction cognitive, des schémas de pensées gagnent du terrain dans votre esprit et tend à court-circuiter les signaux physiologiques de faim et de satiété.
Sur le plan psychologique, les candidats aux régimes d'amaigrissement ne perçoivent pas directement l'impact sur le plan comportemental lié à l'alimentation. La restriction cognitive induite par les diètes restrictives est bien souvent responsable de l'aggravation du problème de poids.
Maigrir sans régime, est-ce possible ?
Plus on fait de régimes, plus on grossit. Cela est dû aux nombreux dérèglements du rassasiement et des envies de manger.
Si vous souhaitez perdre du poids et le stabiliser, la première étape est de se libérer de la restriction cognitive.
Michelle Le Barzic, autrice de "Le syndrome de restriction cognitive: de la norme au désordre du comportement, alimentaire", aborde la restriction cognitive: « si un individu décide de perdre du poids, il cesse de sélectionner sa nourriture en fonction du plaisir qu'elle va lui procurer et déterminer ses choix à partir de ce qu'il sait ou « croit savoir » des propriétés diététiques des divers aliments. Il adopte une disposition intérieure vis-à-vis de la nourriture par laquelle il substitue la raison au plaisir en se contraignant à privilégier les informations cognitives au détriment de ses propres sensations physiologiques pour choisir sa nourriture. »
L'idée étant également d'atteindre un poids morphologique et non celui imposé par la société ou par nous-même.
Ainsi, la restriction cognitive entrave le processus de rassasiement naturel du corps. Les critères du rassasiement sont le plaisir, l'attention et la sérénité. S'il manque un des ces trois éléments, il est possible qu'il y ai restriction, qu'elle soit consciente ou non.
Sources :
- Agence nationale de l'alimentation, de l'environnement et du travail (Anses), Evaluation des risques liés aux pratiques alimentaires d'amaigrissement , 2010.
- Michelle, LE BARZIC, Le syndrome de restriction cognitive: de la norme au désordre ducomportement, alimentaire. Diabetes Metab 2001; 27: 512-6.
- Gérard, APFELDORFER , Jean-Philippe, ZERMATI, La restriction cognitive face à l'obésité, histoire des idées, description clinique, La Presse Médicale, 2001 : Masson Editeur.